Sous la plume de son autrice Gwendoline Destremau, cette réécriture du mythe devient avant tout un prétexte pour parler de la société qui est la nôtre. Sous couvert de la légende que chacun connaît, c’est une Eurydice très actuelle qui prend ici le rôle attribué habituellement à Orphée, et entame une descente aux Enfers pour en extirper son amant. Mais le veut-il seulement ?
Orphée, gravement malade et peu enclin à se battre encore, a peut-être choisi la facilité en optant pour la mort. C’est en tout cas ce que pense la jeune femme, elle qui, pleine de projets de vie pour son couple, refuse d’admettre cette décision. Alors elle écorche la croûte terrestre comme sa propre peau, se sacrifie au nom d’un avenir trop tôt disparu, et s’engage dans une épopée entre réalité et illusion, aux frontières du fantastique, dans une mise en scène qui surpasse les moyens pourtant restreints de production.
Pour cela, la scénographie s’appuie sur des éléments tels que la lumière, aux effets simples mais efficaces, aussi bien que les costumes qui traduisent une créativité de recherche, une vraie volonté de faire. En osant pourtant de dangereux allers-retours entre les époques et les lieux, la troupe nous sert une pièce parfaitement lisible et sensée qui se suit avec plaisir. Les comédiens, bons dans chacun de leurs rôles très variés, portent joliment un texte moderne aux accents d’antiquité.
Les références et autres ponts temporels ne manquent d’ailleurs pas ici, à l’image du chœur qui ouvre et clôt la pièce. Des personnages hauts en couleurs et en reliefs habitent ce spectacle réussi, jamais loin des figures du divertissement potache mais sans jamais y tomber. Une pièce à soutenir, une compagnie à suivre.