Il y a toujours par nature quelque chose de l’ordre du retour en enfance lorsqu’on entre sous un chapiteau. Mais prendre place dans les gradins qui encerclent la piste du Cirque Ici et de Johann Le Guillerm a une saveur toute particulière. De surprise en inventivité, l’artiste nous y convie à une succession de numéros, tous plus hypnotisants les uns que les autres, dans ce spectacle Terces très justement sous-titré « Laboratoire en piste ».
C’est bien l’expérimentation qui se fait ici fil rouge de la conception artistique, dans une approche qui mêle l’humain à la mécanique. En piste, Johann Le Guillerm et ses régisseurs se lancent dans un ballet entre le visible et l’invisible, entre la lumière et les coulisses, pour donner corps et mouvement à toutes sortes de créatures hybrides ouvrant à l’imaginaire. Dans une fluidité horlogère qui rappelle toutefois que l’expérience n’a rien d’hasardeux, Terces se construit comme un terrain de jeu partagé entre artistes et spectateurs.
Évoluant avec un tendre détachement, une grande précision et beaucoup d’ingéniosité, Johann Le Guillerm donne vie à sa pratique comme un artisanat, donnant à son spectacle une saveur douce et poétique. L’artiste confond peu à peu la mécanique et l’humain, empruntant à l’un pour en alimenter l’autre et inversement. Ainsi il invite le regard du public à la curiosité, dans une attente sans cesse renouvelée de la surprise qui trouve systématiquement sa résolution dans l’émerveillement, que le quotidien prenne soudain une dimension exceptionnelle ou que l’extraordinaire se farde peu à peu d’ordinaire.
Que l’on connaisse ou non le travail de Johann Le Guillerm, Terces en est une porte d’entrée des plus convaincantes. De l’intime au spectaculaire, chacun des numéros qui composent ce « Laboratoire en piste » porte sa part d’identité artistique et alimente une forme globale incontestablement équilibrée – dans tous les sens du terme – qui fait honneur à l’art du cirque contemporain.