« Je suis trop vert », le drôle de voyage initiatique de David Lescot

Dans le cadre du festival Saperlipopette à la Cité européenne du Théâtre à Montpellier, David Lescot présentait la troisième pièce de sa saga jeune public. Avec "Je suis trop vert", créé au Théâtre de la Ville à Paris en début de saison, le metteur en scène reprend joliment les codes scéniques des deux premiers chapitres.

Peter Avondo
Peter Avondo  - Critique Spectacle vivant / Journaliste culture
4 mn de lecture

Troisième volet après J’ai trop peur et J’ai trop d’amis, Je suis trop vert s’inscrit dans la poursuite de ce moment charnière qu’est la première année de collège de son protagoniste, Moi. Comme pour asseoir cette continuité narrative, David Lescot travaille d’ailleurs autour de la même scénographie, signée François Gauthier-Lafaye, sur les trois opus. C’est ainsi au cœur de cette structure en contreplaqué, composée de trappes cachées et de recoins insoupçonnés, que l’auteur et metteur en scène développe son dispositif théâtral. Embrassant avec une joie palpable les ressorts du théâtre d’artisanat, il fait ainsi le choix d’une pièce qui s’équilibre entre le texte, le sens et la magie sensible du spectacle.

Par-delà le récit de Moi et de ses angoisses autour de sa première classe verte à la campagne, Je suis trop vert place en effet sa théâtralité dans le plaisir de jouer. Que cela concerne l’interprétation – méconnaissables comédiennes transformées dans le corps et la voix en jeunes garçons – ou la production d’effets aussi simples qu’efficaces à la faveur d’accessoires bien choisis, la pièce devient une terrain ludique d’expérimentation, à l’image du voyage initiatique de Moi. De la sorte, David Lescot ne se contente pas de porter à l’attention des jeunes spectateurs des thématiques approfondies, il travaille aussi à faire de l’outil théâtre un médium de transmission qui s’équilibre entre sérieux et légèreté, touchant à différents niveaux de lecture un public aux âges variés.

© Christophe Raynaud de Lage

Il faut dire que l’auteur et metteur en scène aborde dans ses textes un certain nombre de sujets capitaux. En l’occurrence, les notions de ruralité et de rapport à la nature entrent parfaitement en écho avec la construction identitaire, sociale et humaine de chaque individu. Car à travers son apprentissage personnel, Moi semble surtout découvrir à son rythme le fonctionnement de l’être humain par rapport à lui-même et à son environnement. Son quotidien d’élève de sixième n’est peut-être même pas si différent de celui des adultes dans leur milieu professionnel.

Pour autant, le texte et la mise en scène de David Lescot ne s’imposent par aucune volonté moralisatrice. Je suis trop vert ressort avant tout comme une ode à la découverte, aux choix individuels et à l’ouverture d’esprit. Par le biais de la candeur des personnages qui semblent tout droit sortis d’une planche de BD, c’est une invitation à la douceur, à la tendresse et à l’humour qui est faite à chaque spectateur. Mais que cela n’empêche pas de lire, entre les lignes du conte, tout ce qui fait sens dans le silence…


Je suis trop vert
Création 2024 Théâtre de la Ville (Paris)
Vu au festival Saperlipopette à la Cité européenne du Théâtre – Domaine d’O (Montpellier)

Texte et mise en scène : David Lescot / Scénographie : François Gauthier-Lafaye / Lumières : Juliette Besançon / Assistante à la mise en scène : Mona Taïbi / Costumes : Mariane Delayre / Accessoires : Elisa Couvert / Avec (en alternance) : Lyn Thibault, Elise Marie, Sarah Brannens, Lia Khizioua-Ibanez, Camille Bernon, Marion Verstraeten

Du 5 au 22 juillet 2025 : La ManufactureFestival Off Avignon

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Par Peter Avondo Critique Spectacle vivant / Journaliste culture
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Issu du théâtre et du spectacle vivant, Peter Avondo collabore à la création du magazine Snobinart et se spécialise dans la critique de spectacle vivant. Il intègre en mars 2023 le Syndicat Professionnel de la Critique Théâtre Musique Danse. 06 22 65 94 17 / peter.avondo@snobinart.fr
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