Le samedi 18 janvier avait lieu le vernissage de l’exposition The Pattern of Surface consacrée à Georgia Russell à la Galerie Karsten Greve. L’artiste présente à cette occasion une série d’œuvres inédites réalisées avec une technique qui a fait sa réputation dans le monde de l’art : la découpe au scalpel.
Née en 1974 à Elgin en Ecosse, Georgia Russel a suivi des cours à la Grays School of Art d’Aberdeen (Ecosse), puis au Royal College of Art de Londres. A l’aube du nouveau millénaire, elle s’installe en France, d’abord à Paris, puis à Méru dans l’Oise. Elle a participé à de nombreuses expositions internationales dans de prestigieuses institutions comme le Victoria and Albert Museum de Londres, le Museum of Arts and Design de New York ou encore au Bellevue Arts Museum de Washington. Elle a également été nommée « artiste de l’année » par la foire Art Basel en 2014.
Quand on voit une toile déchirée, on pense forcément à Lucio Fontana. L’artiste italo-argentin, fer de lance du spatialisme, a fait sa renommée grâce à ses monochromes fendus. Au-delà du geste en lui-même, c’est surtout la symbolique qu’on lui porte comme intervention de liberté qui rapproche Lucio Fontana et Georgia Russell. Car si le premier assumait une démarche quasi-scientifique autour de l’espace, il se dégage chez la seconde une grande poésie autour du corps et de la lumière.
Pour ses nouvelles œuvres présentées à la Galerie Karsten Greve, Georgia Russell explore une nouvelle technique avec l’impression d’organza sur toile, en utilisant un tissu imprégné de peinture pour créer des empreintes colorées. Si elle coupe les surfaces avec un scalpel, c’est parce que ce dernier lui apporte une précision plus importante que le couteau… mais cet outil a aussi une forte portée symbolique, notamment parce qu’il est utilisé en chirurgie pour inciser ou disséquer. L’utilisation de l’organza n’est pas anodine non plus. Sa superposition et sa découpe montrent que l’artiste explore toute la richesse de cette matière, la révélant de manière inattendue, et déroutant ainsi le spectateur qui s’interroge devant ces productions peu communes. L’organza peut alors faire penser aux différents tissus de l’organisme que l’artiste vient scalper pour leur donner vie. Est-ce alors une création ? Une réparation ? Une destruction ? Peut-être tout ça à la fois. Ce qui est certain, c’est que l’art devient alors une opération délicate qui révèle ainsi la précision du travail de Georgia Russell et toute la fragilité de ses pièces charnelles.
Si les œuvres de Georgia Russell peuvent être vues comme des corps, elles sont aussi une allégorie autour de la transparence et de la lumière. Comme nous le dit la galerie : « la matière devient comme un voile translucide dont l’irisation joue à l’infini avec la lumière, évoquant les éléments, du bruissement des feuilles dans l’air au miroitement de l’eau ». Cela témoigne de toute la sensibilité de Georgia Russell et de l’importance de la nature dans son travail. Les superpositions et les déchirures jouent avec la lumière, qui elle-même se plaît à les métamorphoser selon ses variations.
En parallèle, Georgia Russell présente également plusieurs « livres-sculptures » qui montrent toute l’importance, non pas du discours, mais de la narration dans sa production.
The Pattern of Surface
Georgia Russell
Galerie Karsten Greve (Paris)
jusqu’au 5 avril 2025