C’est l’un des événements les plus sordides de ces quinze dernières années. C’est aussi l’un des faits divers qui a le plus fasciné les Français depuis la découverte des corps de la famille de celui qui n’a toujours pas été retrouvé, Xavier Dupont de Ligonnès, à Nantes le 21 avril 2011. À l’été 2020, neuf ans après les faits, le magazine Society avait mené l’enquête en consacrant pas moins de deux numéros spéciaux à celui que l’on surnomme par ses initiales XDDL, avant de l’éditer sous forme d’un livre aux éditions Marabout en décembre de la même année.
Quatre ans plus tard, c’est au tour de l’écrivain Romain Puértolas de revenir sur la cavale de l’assassin présumé. Dans Comment j’ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès, l’auteur montpelliérain mêle, comme il nous y a habitué dans ses précédents romans, la réalité à la fiction, en se jouant allègrement des frontières qui les séparent. Alimentant son récit de faits, de preuves et de véritables éléments d’enquête, il s’affaire aussi sans réserve à imaginer toutes les hypothèses possibles, même les plus farfelues.
Il faut dire qu’avant de rencontrer le succès avec son roman L’Extraordinaire Voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea, Romain Puértolas était policier. De cette époque, il a visiblement gardé un goût pour l’enquête, particulièrement autour de l’affaire XDDL qui semble l’obséder. Pour lui, il s’agit moins de retrouver le fugitif pour le soumettre à la justice – l’auteur rappelle d’ailleurs non sans humour que jusqu’à preuve du contraire, Dupont de Ligonnès est toujours présumé innocent –, que de prouver qu’il est toujours en vie… du moins jusqu’à ce que Puértolas lui-même le tue dès le premier chapitre de sa fiction !
Développant son récit sur trois temporalités, et jouant d’un humour noir qui ne s’excuse de rien, l’écrivain rassemble peu à peu les morceaux d’un puzzle qui n’en finit pas d’être incomplet. Pourtant il y a une certaine logique, dans cet assemblage de scénarios qu’il esquisse avec espoir plus qu’avec conviction. Et bien que les preuves tangibles se fassent de plus en plus rares à mesure que les années passent, Romain Puértolas sert un récit auquel on voudrait pouvoir croire, ne serait-ce que pour mettre un point final à cette affaire.
Dans l’esprit de précédents ouvrages, l’auteur rivalise ainsi de tournures et trouvailles irrésistiblement comiques pour tisser la trame d’un récit plus profond, plus sombre. Il s’empare de ce drame comme d’un sujet de société qu’il traite, sous couvert de la dérision, avec une écriture aussi rigoureuse qu’accessible, pour ce roman qui se lit d’une traite.