Depuis plusieurs années, le Festival d’Avignon cherche à développer un lien étroit entre les artistes et les spectateurs, notamment au travers des réseaux sociaux et des captations filmées. Cette 75e édition ne fait pas exception, encore moins du fait de la situation sanitaire qui a nettement limité les déplacements des festivaliers.
La question de la vidéo dans le spectacle vivant, et particulièrement dans le théâtre, fait partie des sujets qui divisent. Si certains metteurs en scène prennent le parti d’utiliser cet outil dans leurs spectacles, au point parfois d’axer leurs créations essentiellement autour de la vidéo, d’autres au contraire ont une vision beaucoup plus traditionnelle du théâtre et refusent catégoriquement ce genre de fantaisies.
Pour la captation même d’une pièce de théâtre, l’interrogation continue d’être soulevée. Le spectacle décrit comme vivant doit-il (ou peut-il ?) être filmé et diffusé sur un écran, sans trop perdre de son intérêt général ? À cette question, le Festival d’Avignon semble apporter une réponse en demi-mesure, en proposant de visionner certaines créations de la programmation sur son site internet ou sur Facebook.
Regarder une pièce de théâtre comme on regarde un téléfilm… l’idée ne date pas d’hier. Depuis les années 1960, l’émission Au théâtre ce soir permettait aux français d’assister à des représentations théâtrales directement depuis leur salon. En d’autres termes, depuis l’avènement de la télévision et son arrivée comme objet du quotidien dans nos foyers, le lien entre les deux s’est fait de manière presque naturelle, avant de se dissiper à la fin du siècle dernier.
Désintérêt pour le théâtre ou complexité à retranscrire toute l’âme d’une pièce via un écran ? Difficile de déterminer la véritable raison de ce délitement. Depuis quelques années, pourtant, il est devenu essentiel pour le spectacle vivant de trouver une nouvelle voie vers un public qui ne se déplace plus, ou presque. Les chaînes de télévision (notamment sur le service public) proposent de nouveaux programmes culturels, et les organisateurs eux-mêmes offrent un accès numérique à certains spectacles, comme le fait le Festival d’Avignon depuis 2015.
Sous la direction d’Olivier Py, qui a toujours œuvré pour un théâtre qui fait tomber les murs, le festival lance alors son Feuilleton Théâtral, une création en plusieurs épisodes jouée dans le jardin Ceccano. Ce rendez-vous sera confié chaque année à un metteur en scène différent et sera diffusé en direct sur les réseaux sociaux, dans l’esprit populaire du Festival.
Pour cette 75e édition, c’est le directeur lui-même qui a créé un feuilleton autour de la pièce Hamlet de Shakespeare, et dont l’ensemble des épisodes est à retrouver sur la page Facebook de l’événement. En parallèle, d’autres créations ont été filmées cette année et peuvent être visionnées en ligne jusqu’à la fin du festival. Pour les amateurs de théâtre qui n’ont pas pu se déplacer, c’est l’occasion de découvrir :
- La Cerisaie (Anton Tchekhov), mise en scène de Tiago Rodrigues avec Isabelle Huppert
- Hamlet à l’impératif ! (Olivier Py), la pièce intégrale qui a inspiré le feuilleton théâtral 2021
- Kingdom (Anne-Cécile Vandalem)
Photo : © Christophe Raynaud de Lage – Festival d’Avignon