Des tons pastels des cheveux aux costumes, des décors dignes de Disneyland, des références du monde de l’enfance et des passages à la limite du potache : voilà l’étonnante mixture préparée par Anna Bernreiter autour de l’un des plus grands opéras de l’histoire. Pourtant, en dépit des apparences qui, avouons-le, questionnent au premier abord, la metteuse en scène nous fait voir une Flûte enchantée telle que l’opéra fut écrit : léger, drôle et de qualité.
En assumant ce regard enfantin sur cette œuvre de génie, Anna Bernreiter s’octroie aussi tout un espace de liberté que l’opéra dans sa plus grande tradition ne lui permettrait sans doute pas. Ainsi on utilise des ressorts techniques et scénographiques irrésistiblement kitsch. On suspend les chanteurs dans les airs pour les faire voler comme par magie… ou presque – une performance qui tient d’ailleurs de l’exploit tant on sait l’importance de l’ancrage au sol pour le chant.
Grâce à un travail pointilleux sur la vidéo qui s’inspire du mapping – cette technique qui consiste à habiller des bâtiments avec des effets de projection –, on intègre aussi des effets spéciaux en d’autres circonstances inaccessibles. La mise en scène en devient très cartoonesque mais toujours bien pensée, entre grands classiques Disney, culture manga comme Dragon Ball et jeux vidéo. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien si un jeu, intitulé Crescendo, a été développé dans le cadre de cet opéra !
Outre les effets scéniques et les décors qui révèlent toute l’ampleur du travail mené dans le cadre de cette création, ajoutons une mention spéciale à la conception des costumes. Là où il serait aisé de tomber dans le piège de la facilité de la démonstration, Hannah Oellinger et Manfred Rainer misent sur l’élégance et la suggestion pour compléter, sans lourdeur, la scénographie déjà très colorée de cette Flûte enchantée.
Résultat : cette version imaginée à destination des jeunes publics – en dépit de ses incompressibles 2h30 de spectacle – touche aussi bien un public adulte peu habitué à l’opéra, et c’est heureux ! Avec son plateau tournant qui fait penser à un carrousel et ses effets vidéos qui transforment la pièce en un dessin animé interactif, on se laisse porter avec délectation à la redécouverte de cette œuvre et à la recherche de la moindre référence.
À voir cette version d’Anna Bernreiter, il nous apparaît comme une évidence que cette approche légère colle avec autant de pertinence à la pièce imaginée par Mozart. C’est comme si Broadway s’invitait dans la tradition opératique européenne, dans ce qui ressemble presque à une comédie musicale moderne. En résumé, cette mise en scène mêle la légèreté de l’enfance à la rigueur de l’opéra traditionnel, une recette très sucrée sans aucune overdose !
À (RE)VOIR
– jusqu’au 19/01 à l’Opéra Comédie de Montpellier
DE
WOLFGANG AMADEUS MOZART
DIRECTION MUSICALE
CONSTANTIN TRINKS
MISE EN SCENE
ANNA BERNREITER
AVEC
AMITAI PATI, ATHANASIA ZOHRER, RAINELLE KRAUSE, MIKHAIL TIMOSHENKO, NORMA NAHOUN, CLAIRE DE SEVIGNE, CYRIELLE NDJIKI, MAJDOULINE ZERARI, IN SUNG SIM, BENOIT RAMEAU, BLAISE MALABA, HYOUNGSUB KIM, ALBERT ALCARAZ, CHŒUR OPERA NATIONAL MONTPELLIER OCCITANIE, ORCHESTRE NATIONAL MONTPELLIER OCCITANIE, EMMANUELLE FAUCHET, ELENA SEVILLA, ELISE PILLOIS, LOIC QUENOU, COLLIN HILL ET LES SOLISTES OPERA JUNIOR DIRIGES PAR LAETITIA TOULOUSE
DECORS, COSTUMES ET ANIMATION
HANNAH OELLINGER, MANFRED RAINER
LUMIERES
OLAF FREESE
CHEFFE DE CHŒUR
NOELLE GENY
CHEFFE DE CHANT
ANNE PAGES-BOISSET
ASSISTANAT A LA DIRECTION MUSICALE
ALEXANDRE LUBCHANSKY, KA HOU FAN
ASSISTANAT A LA MISE EN SCENE
PENELOPE DRIANT
REGISSEUR DE PRODUCTION
JULIEN BARLA
REGISSEUSES DE SCENE
MIREILLE JOUVE, ANAIS PELAQUIER
REGISSEUSE DE CHŒUR
MAYA LEHEC
SURTITRES
RICHARD NEEL
REGISSEUSE SURTITRES
TESSA THIERY
REALISATION DECORS
ATELIERS TECNOSCENA
FABRICATION COSTUMES
ATELIER COSTUMES DE L’OPERA NATIONALE DE LORRAINE