Lumières-salle allumées, le spectacle commence. On nous annonce que le jeune Maire, écologiste convaincu et agriculteur Bio de notre petite ville rurale, a décidé en secret d’accepter le déploiement d’antennes-relais nouvelle génération de 30 mètres de haut, et ce sans nous consulter, nous public et habitants de la commune. Nous allons donc devoir voter, mais avant une question se pose : comment en est-on arrivés là ?
Une exploration des contrastes
Aussi étonnant que cela puisse paraître d’une pièce traitant d’antennes téléphoniques, l’histoire est prenante dès les premières minutes. Elle nous emporte dans une double temporalité ; tantôt dans une forme au présent presque participative avec une adresse directe au public et un plateau sobre aux lumières froides de salle communale, tantôt en nous plongeant, impuissants observateurs bloqués derrière le quatrième mur, dans le passé du Maire de l’histoire. C’est ici que toute l’ingéniosité de la mise en scène enlevée de Paul-Eloi Forget et Samuel Valensi se déploie. Les déplacements sont rythmés et précis, la scénographie d’apparence simple se métamorphose en tableaux cinématographiques grâce aux lumières, à l’utilisation brillante des accessoires et aux interventions toujours à propos d’une violoniste. La beauté n’est alors jamais décorative mais toujours au service de l’histoire, des personnages et des émotions. On nous mène, tambour battant, d’épisodes de rires accentués par le jeu parfois surréaliste, limite clownesque des acteurs, aux moments de sincérité touchants du drame humain qui se joue devant nous. Les comédiens passent de rôles en rôles avec brio (agriculteurs, livreur, standardiste, préfète, huissier, représentants, adjoint à l’urbanisme…) avec une mention spéciale pour l’écriture du couple de vieux agriculteurs qui en trois scènes nous résument toute l’ambivalence de la nature humaine et nous conduisent de l’empathie à l’indignation étonnée. Brillant.
Une très fine et divertissante critique de l’absurdité démocratique où le clivage entre électeurs, élus, et hiérarchie nommée se dessine et nous interroge sur le poids de notre volonté individuelle face au monstre technocratique qui nous surplombe.
Une pièce où, une fois n’est pas coutume, nous pouvons parier que le public finira debout ! Un très bon moment.
« Coupures »
THEATRE DE LA CONCORDE – Paris
du 12 au 15 novembre 2025
à 20h / Représentation supplémentaire le 15 à 16h
Une création deLa Poursuite du Bleu
Écriture et mise en scènePaul-Eloi Forget et Samuel Valensi
AvecJune Assal, Brice Borg, Michel Derville, Valérie Moinet, Samuel Valensi et Lison Favard en alternance avec Emelyne Chirol
Composition musicaleLison Favard
Création sonoreJulien Lafosse
Création lumièresAngélique Bourcet
ScénographieJulie Mahieu et Sandrine Lamblin
Création vidéoFlorian Moreau
RégieFrédéric Evrard
Avec le précieux regard deNathalie Juvet
ProductionLa Poursuite du Bleu – Lucy Decronumbourg, assistée de Clémentine Armand
SoutiensGround Control, Fluctuart, Théâtre du Rond-Point, Théâtre du Marché Jouy-en-Josas, Jean Despax, Michel Derville, Margaux Gregoir, Nicolas Laugero-Lasserre
CommunicationEmma Temporal
DiffusionLes Béliers en tournée
Relations pressePascal Zelcer


