L’exposition originale qui nous est présentée à la Collection Lambert est le résultat d’une collaboration entre des citoyens, un artiste et le personnel du centre d’art contemporain : « Ce commissariat qui inclut des personnes en situation de précarité —accompagnées par différentes structures sociales — propose une bouleversante archéologie de la tendresse qui fait vibrer les œuvres de la Collection Lambert et agit comme un révélateur de notre fragilité commune. » La Collection Lambert s’est donc associée au Festival C’est pas du luxe ! et à l’artiste Mohamed El Kathib pour inventer un projet inédit autour des œuvres du fonds conservé à Avignon : chacun était invité à venir avec un objet personnel qui lui est cher. Ces objets ont ensuite été associés avec des oeuvres de la Collection.
A travers l’exposition notre musée, une collection sentimentale, la Collection Lambert a souhaité questionner « le musée ». Qu’est-ce qu’un musée ? Que serait votre musée idéal ? En effet, la structure interroge l’ensemble de la chaîne de production artistique (de sa conception en passant par la réalisation et jusqu’à sa médiation).
L’exposition débute par l’oeuvre Sas de contamination de Thomas Hirschhorn. Ce long couloir immersif est une manière de plonger dans l’exposition en toute intimité. Viennent ensuite des objets du quotidien (comme un ouvre-boîte, une pièce de cinq francs, une croix camarguaise…) qui sont mis en relation avec les oeuvres de la Collection Lambert.
En concentrant sa réflexion sur la seule interrogation des enjeux muséaux, la Collection cache ici une autre interrogation non moins pertinente : les objets associés aux oeuvres de la collection deviennent-ils eux-mêmes une oeuvre ? Leur présence dans l’enceinte de la structure avignonnaise change-t-elle leur dimension ? Pour n’importe qui, ces objets n’ont rien de particulier, alors qu’ils détiennent une place toute particulière dans le coeur de leur propriétaire. En les exposant à la vue de tous à travers un accrochage minutieux et réfléchi, il est évident qu’ils prennent une mesure toute autre. Cette attention qui leur est portée et le regard que nous leur posons ont changé leur fonction d’origine. Cette dernière disparaît pour laisser place à une autre émotion, se rapprochant ainsi du ready-made de Duchamp.
Mais alors, cet objet devient-il oeuvre d’art ? Si la question mérite d’être posée, nous ne pouvons répondre par l’affirmative. Une oeuvre acquiert ce statut par son créateur et non par sa monstration dans une enceinte artistique. Ce qui réunit les objets aux oeuvres est la valeur sentimentale et émotionnelle. L’oeuvre d’art provoque généralement une émotion. Le fait de sortir l’ouvre-boîte du tiroir, de raconter son histoire et de le sublimer avec un accrochage digne d’une oeuvre d’art provoque un sentiment nouveau.
notre musée, une collection sentimentale est une belle exposition. Elle a le mérite de brouiller les pistes en interrogeant le visiteur sur la création et sa monstration. Elle permet de revenir également aux fondamentaux, affirmant que l’art a toujours été lié aux sentiments.