Les mirages de Paula Querido à la Galerie Lazarew

La Galerie Lazarew présente la première exposition française de Paula Querido. Intitulée "O que sinto daqui" ("Ce que je ressens ici"), cette mise en lumière dévoile des peintures comme des mirages dans un univers doux et harmonieux.

Thibault Loucheux-Legendre
Thibault Loucheux-Legendre  - Rédacteur en chef / Critique d'art
4 mn de lecture

Paula Querido présente ses peintures pour la première fois en France à la Galerie Lazarew avec  O que sinto daqui. Née en 1992 à Rio de Janeiro, l’artiste a étudié la peinture à la New York Studio School. Elle vit et travaille dans la Big Apple depuis une dizaine d’années. En 2023, elle a remporté le Hohenberg Travel Award qui lui a permis de réaliser un voyage artistique en Espagne, en France et en Italie.

Vous est-il déjà arrivé de voir cet effet de flou provoqué par la chaleur ? Cela peut se produire en regardant une route goudronnée brulante, une plaque de cuisson, un barbecue ou un feu… Les objets vibrent, bougent, donnant une impression de flou. Dans les films, cet effet est souvent donné dans les plans tournés dans les déserts. Ce phénomène s’appelle la diffraction thermique (ou mirage thermique) et se produit lorsque la lumière traverse des couches d’air à des températures différentes. La forte chaleur crée des variations de densité dans l’air et nos yeux perçoivent ces déviations comme des images floues, des mouvements avec torsions et frémissements. 

C’est cet effet d’ondulation, presque comme une danse, qui m’a sauté aux yeux quand j’ai découvert les toiles de Paula Querido à la Galerie Lazarew. Ses œuvres sont comme des mirages, se détournant des détails dans ses compositions. Les formes apparaissent grâce à la chaleur que les peintures dégagent. A l’image de ce phénomène de diffraction thermique expliqué précédemment, l’artiste fait se côtoyer les couleurs chaudes et froides, comme ce soleil incandescent dans la toile A Rede qui tire le bleu du ciel vers le vert. Chez Paula Querido, même les bleus sont chauds, comme cette œuvre avec des dominantes azur et bleu paon représentant une piscine qui est pourtant intitulée A Toalha Vermelha (La Serviette Rouge) soulignant ainsi le seul élément chaud de la toile.

Cette cohabitation entre le chaud et le froid révèle un phénomène de dualité plus large dans l’œuvre de Paula Querido, que l’artiste parvient souvent à nuancer en apportant d’autres éléments à cette coexistence. On pense à l’imprégnation de ses deux lieux de vie, son Brésil natal et sa vie contemporaine à New York que l’artiste vient enrichir de ses nombreux voyages à travers le monde. La galerie nous explique également le rôle capital que joue le son dans les toiles de Paula Querido : « Les formes et les couleurs se déploient en une partition sonore, parfois musicale, irrésistible; cette analogie avec la musique n’est pas fortuite, tant celle-ci occupe une place centrale dans la vie de l’artiste. » Une nouvelle dualité apparaît avec la musique qui pourrait s’opposer aux silences, ou le mouvement de certaines toiles qui peuvent venir renforcer la quiétude d’autres pièces, comme ces personnages paisibles qui se reposent dans des hamacs. De ces doubles naît l’harmonie, avec des toiles qui sont comme des apparitions et desquelles il se dégage une immense douceur.

O que sinto daqui
Paula Querido 
Galerie Lazarew (Paris)
Jusqu’au 14 juin 2025

Lire + de
Partager cet article
Avatar photo
Par Thibault Loucheux-Legendre Rédacteur en chef / Critique d'art
Suivre :
Après avoir étudié l'histoire et le cinéma, Thibault Loucheux-Legendre a travaillé au sein de différentes rédactions avant de lancer Snobinart et de se spécialiser dans la critique d'art contemporain. Il est également l'auteur de plusieurs romans. 06 71 06 16 43 / thibault.loucheux@snobinart.fr
Laisser un commentaire

Abonnez-vous au magazine