Chaque sortie d’un roman de Michel Houellebecq est un événement. Il est le seul écrivain français incontestable. Visionnaire et portraitiste d’une société occidentale en perdition, Houellebecq n’est pas un auteur du pessimisme, mais bien un génie de la vérité. Avec anéantir, il sort son huitième roman, poursuivant une œuvre d’une maîtrise absolue.
Prix Goncourt en 2010 pour La carte et le territoire, l’un des auteurs français les plus traduits et vendus à l’étranger… Michel Houellebecq est un événement littéraire à chacune de ses nouvelles parutions. Cela faisait trois ans que l’auteur n’avait pas publié de roman, depuis Sérotonine sorti durant l’hiver 2019 (450 000 exemplaires vendus).
Pour anéantir, le processus de sortie a été une nouvelle fois savamment orchestré. Le titre n’a été dévoilé que le 17 décembre dernier, jour où les livres ont été envoyés à la presse qui avait interdiction d’en dévoiler le contenu avant le 30 décembre (malgré quelques piratages sont Internet). Voici qu’est arrivé anéantir le 7 janvier dernier. Ce nouveau roman de 736 pages publié en 300 000 exemplaires dans une édition de luxe « a l’allemande » reliée avec couverture cartonnée est le plus gros livre de son auteur. Le 29 août 2015, Houellebecq confiait dans l’émission On n’est pas couché qu’il rêvait d’écrire « un gros livre avec des passages ennuyeux (…) écrire un gros livre c’est très dur. » C’est désormais chose faite !
anéantir se déroule dans un futur proche, pendant l’élection présidentielle de 2027. Houellebecq y raconte l’histoire de Paul Raison, énarque qui travaille au service du Ministre de l’Economie et des Finances Bruno Juge (probable référence à l’actuel ministre Bruno Le Maire, proche de Michel Houellebecq). D’un point de vue personnel, le haut fonctionnaire partage son temps entre Bercy et la campagne du Beaujolais. Une période triste durant laquelle il voit son père être victime d’un AVC et ainsi rester paralysé. Son couple n’est pas au mieux non plus, sa vie conjugale étant proche de néant avec une femme qui ne dort pas dans le même lit que lui. Mais la vie est là et laisse parfois un espoir en l’amour, et sa compagne Prudence se rapproche de lui, prouvant ainsi qu’ils s’aiment encore.
Dans ce roman, Michel Houellebecq poursuit une œuvre dans laquelle il élabore un diagnostic de notre société, en y décrivant la « souffrance ordinaire ». Ce n’est pas son livre le plus provocateur ou le plus subversif, mais il présente tout de même un monde en déclin dans lequel l’espoir a laissé place à la mélancolie, seuls subsiste quelques moments de joie et d’amour. Un livre unique qui se place parfaitement dans la continuité de l’oeuvre magistrale de son auteur. Nous y trouvons des thèmes universels comme l’amour et la mort, qui sont questionnés au sein d’une société occidentale sur le déclin et au moment de l’effondrement du christianisme. On se délecte de retrouver le style, le cynisme et l’humour grinçant d’un auteur qui traversera les siècles.