Le corps et l’art, c’est une histoire éternelle… et le retour en force de la figuration ne fait qu’entretenir cette relation aujourd’hui. C’est dans cette tradition que la Bourse de commerce s’inscrit avec sa dernière exposition intitulée Corps et âmes. Emma Lavigne, commissaire de l’exposition, a sélectionné une centaine d’œuvres d’une quarantaine d’artistes issus de la Collection Pinault pour interroger le visiteur sur la représentation du corps dans l’art contemporain.
En prélude de l’exposition, la Bourse de commerce présente trois films de l’artiste et cinéaste Arthur Jafa qui propose de faire corps avec ses vidéos, ainsi que les œuvres d’Ali Cherri qui prennent place dans les vingt-quatre vitrines du Passage de la Bourse de commerce.
«Corps et âmes» débute avec une œuvre de Georg Baselitz, installée dans le Vestibule de la Bourse de Commerce. Elle est suivie par un diptyque magnétique de Gideon Appah ainsi que du film Silueta Sangrienta (1975) d’Ana Mendieta. D’emblée, la Bourse de commerce nous montre toute la pluralité des supports et des figures qui composent cette exposition : « Libéré de tout carcan mimétique, le corps qu’il soit photographié, dessiné, sculpté, filmé ou peint ne cesse de se réinventer, conférant à l’art une organicité essentielle lui permettant, tel un cordon ombilical, de prendre le pouls du corps et de l’âme humaine. L’art se saisit des énergies, des flux vitaux de la pensée et de la vie intérieure, pour inviter à une expérience engagée et humaniste de l’altérité. » Alors que chaque jour qui passe exacerbe encore plus une tension généralisée, cette exposition prend tout son sens. Les œuvres présentées et l’accrochage nous donnent une leçon sur le vivre-ensemble. Aborder le corps, c’est aussi évoquer la tolérance, mettre l’accent sur ce qui nous rassemble, malgré nos différences. Le corps fascine car il est universel. Nous en disposons tous d’un, sensiblement identique et pourtant marqué par des distinctions. Une même enveloppe pour une multitude de formes. L’énergie corporelle est saisie par les artistes qui peuvent, eux aussi, en offrir des représentations variées, interceptant des détails perceptibles uniquement par leur esprit créatif. Cela offre un sujet singulier à l’exposition, le corps, mais aussi une grande richesse de représentations de formes par les médiums utilisés et l’originalité de ces créateurs. En cela, l’exposition trouve un juste équilibre entre esthétique, politique et spiritualité.
Nombreux sont les artistes présentés à avoir fait de cette notion de tolérance un thème primordial dans la compréhension de leurs œuvres. Certains condamnent les ségrégations raciales (Philip Guston, David Hammons…), d’autres interrogent les représentations du corps de la femme, parfois les deux en même temps (Niki de Saint Phalle, Kerry James Marshall…)… La présence importante d’artistes africains et afro-américains renforce cette idée d’explorer les blessures du passé pour envoyer un message de paix pour l’avenir. Le film Love is the Message, the Message is Death d’Arthur Jafa qui est diffusé dans la Rotonde autour de l’engagement des icônes afro-américaines comme Martin Luther King Jr, Jimi Hendrix, Barack Obama ou Beyoncé, en est le symbole.
D’autres questions sont soulevées par ces plasticiens, comme celle de la matérialité (Marlène Dumas) ou encore de la spiritualité, interpellant le visiteur sur la notion de corps comme incarnation de l’âme (Michael Armitage, Peter Doig…).
Corps et âmes
Bourse de commerce – Pinault Collection (Paris)
Jusqu’au 25 août 2025