Tu es un jeune commissaire d’exposition et critique d’art. Est-ce que tu peux te présenter un petit peu à nos lecteurs et expliquer ton parcours ?
Je suis né en 1999 à Dijon, donc j’ai 26 ans. Je ne viens pas d’une famille que je pourrais qualifier de très férue d’art ou de culture, je pense que j’ai reçu un bagage culturel important. Je ne peux pas dire que mes parents sont grands passionnés d’art, mais il y a quand même dans ma famille des choses qui ont un peu ouvert la voie à cette notion-là. D’une part, j’ai un grand-père qui peignait, un peu comme un peintre du dimanche, et il s’est vraiment pris au jeu au fil du temps pendant sa retraite. Je pense qu’il a découvert ça comme un moment qu’il s’accordait presque tous les jours, comme une introspection, un retour sur lui-même, une espèce plongée un peu cathartique dans la matière. Le voir comme ça, je pense que ça a été une première expérience un peu fondamentale. D’autre part, j’ai une partie de ma famille qui est hollandaise et il y a toujours eu un intérêt pour la peinture flamande. Mes premiers souvenirs de peinture, c’est une expo en 2010 ou 2011 à la Pinacothèque de Paris, qui est fermée aujourd’hui. C’était une exposition sur la peinture flamande, sur les primitifs flamands donc sur van Eyck, Van der Weyden… Une peinture assez rugueuse, que je qualifierais pas d’une peinture très à la mode aujourd’hui, mais je pense que c’est le moment où je me suis rendu compte qu’il se passait vraiment quelque chose de très mystérieux sur un tableau. J’avais été un peu impressionné, il y avait une très belle scénographie, assez sombre avec des spots vraiment forts sur les tableaux qui faisaient vraiment ressortir l’œuvre. Cette atmosphère un petit peu mystérieuse qui m’a vraiment marqué à l’époque. Il y a eu une autre graine qui a été plantée à ce moment-là qui définit une bonne partie de ma relation à la peinture, qui est une relation à un objet de mystère, d’émerveillement et de recherche qui est à la fois intérieur et intellectuel. C’est pas venu tout de suite cette idée de travailler dans le monde de l’art. J’ai continué à faire quelques expos, quelques musées… J’ai fait des études de lettres au départ, j’ai fait une prépa littéraire, ce qui m’a permis d’avoir une bonne introduction, même en philosophie esthétique, en début de l’histoire de l’art… Ensuite j’ai fait une école de commerce donc rien à voir… et au bout d’un moment, il y a eu une espèce d’inconscient qui s’est révélée, j’avais très envie de travailler dans ce milieu. J’avais envie de travailler avec des œuvres, j’avais envie de travailler avec des artistes, j’avais envie de mieux connaître ce truc que je trouvais très mystérieux et très intrigant. Donc je me suis inscrit cours du soir du Louvre en auditeur libre et ça a été une année fondatrice. Je pense qu’il y a eu une vraie rencontre intellectuelle avec ce milieu. Quelques mois plus tard, j’ai fait un premier stage dans une galerie pour laquelle j’ai travaillé pendant un peu moins de deux ans. C’était à la Galerie Hélène Bailly, qui est spécialisée dans l’art impressionniste et moderne et j’ai eu la chance d’être en charge des achats pour la galerie. C’est vraiment du travail d’approfondissement, de recherche de provenance, d’authenticité, de condition, de l’œuvre… et déjà ça m’a exposé à la réalité du métier de galeriste et du marché de l’art. Ça m’a vraiment forcé à blinder mes connaissances sur l’art moderne et sur l’impressionnisme, donc ça a vraiment été deux ans d’engrangement de connaissances brutes. J’ai toujours eu un rapport assez interrogatif à l’œuvre, à me demander ce que cette chose est en train de me dire au-delà de son histoire, au-delà de la manifestation qu’elle est d’un certain idéal esthétique… qu’est-ce qu’elle veut dire vraiment, quasiment existentiellement. C’est devenu un lieu de recherche, presque philosophique, ou dans le champ de la philosophie esthétique : qu’est-ce que le cubisme veut dire sur une partie de l’identité moderne ? Qu’est-ce que l’impressionnisme a introduit comme révolution dans le regard à cette époque-là ?
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