« Sunken City » de Louis Barbe, le bruit avant la tempête

C'est un humour menaçant qui règne dans les toiles de Louis Barbe. Etudiant à l'école des Beaux-Arts de Paris, le peintre développe déjà, avec une grande personnalité, un univers singulier et marquant. Il présente sa première exposition personnelle Sunken City à la Galerie Lazarew du 9 octobre au 8 novembre 2025.

Thibault Loucheux-Legendre
Thibault Loucheux-Legendre  - Rédacteur en chef / Critique d'art
3 mn de lecture

Louis Barbe est né à l’aube du deuxième millénaire (en 2001 précisément). Il est un héritier de la culture street apparue dans les années 1980-1990. Durant sa jeunesse bordelaise, il baigne dans le monde du skateboard et du graffiti. À vingt ans, il intègre les Beaux-Arts de Paris, fréquentant les ateliers peintures de François Boisrond, James Rielly et Olivier Blanckart. Cette année, il a réalisé un séjour de quatre mois au OTISCollege of Art & Design de Los Angeles.

On trouve des œuvres réalisées durant ses semaines américaines à l’occasion de cette exposition à la Galerie Lazarew. C’est un événement marquant pour le peintre, Sunken City étant sa première exposition personnelle.

À l’image du peintre qui nous est présenté, nous allons mettre les pieds dans le plat. Trois éléments sautent aux yeux en regardant ses peintures : les visages des personnages, les couleurs et enfin la composition. L’artiste peint des gueules ultra expressives. Elles sont euphoriques, réjouies, les traits marqués par une joie béate. D’autres personnages, impassibles, ne sont pas moins expressifs. Parmi ses contemporains, on pense à Marcos Carrasquer, à Sacha Cambier de Montravel (en moins Boschien)… Les teintes de couleurs cohabitent. Certaines sont criardes, presque fluo et côtoient les kakis, les gris, les beiges… créant ainsi contraste et ambiguïté.

Ces personnages et ces couleurs renforcent le côté humoristique, sans pour autant cacher la menace bel et bien présente. Les gueules, qui nous amusaient au premier coup d’œil, deviennent soudainement drôles… Les humains figurés sont dans l’action, ils dansent, parlent, courent… mais ce divertissement est un leurre. Le chaos dissimulé d’une époque se déploie devant nos yeux impuissants. Le diable se cache dans les détails : les nuages sont là, mais il ne pleut pas encore… Des hommes visent avec des fusils, mais n’ont pas encore tiré… On ne peut parler de « calme avant la tempête » tant Louis Barbe développe une peinture du bruit et du mouvement qui cache une menace. On pensait que l’artiste avait détruit la frontière entre le réel et la fiction, mais les dangers qui surgissent de ses toiles ne cessent de nous ramener à la dure réalité d’une époque qui a fait de la fuite et du divertissement le meilleur moyen de fermer les yeux sur une ombre qui gagne du terrain.

Désordre et disproportion, voilà l’équilibre qui est choisi. Tout semble tenir avec une stabilité précaire, à l’image de son tableau Le château de sable (2024), dont les constructions ressemblent étrangement aux habitations représentées dans Westchester, spring break rooftop (2025). Avec ses toiles, Louis Barbe et sur un fil, mais réussit son numéro de funambule.

Sunken City , Louis Barbe
Galerie Lazarew (Paris)
du 9 octobre au 8 novembre 2025

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Par Thibault Loucheux-Legendre Rédacteur en chef / Critique d'art
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Après avoir étudié l'histoire et le cinéma, Thibault Loucheux-Legendre a travaillé au sein de différentes rédactions avant de lancer Snobinart et de se spécialiser dans la critique d'art contemporain. Il est également l'auteur de plusieurs romans. 06 71 06 16 43 / thibault.loucheux@snobinart.fr
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