Action, Geste, Peinture réunit quatre-vingt-cinq artistes femmes originaires de plus de trente pays différents. À travers leurs cent-trente-deux œuvres exposées, nous découvrons comment elles sont parvenues à agrandir le champ de l’expressionnisme abstrait sur une durée de quarante années : « S’inspirant des mouvements d’avant-garde tels que l’art informel ou le surréalisme, elles ont conçu leur pratique créative comme une arène dans laquelle agir, expérimenter et développer la conscience de soi ».
Durant cette période capitale qu’a été le milieu du XXe siècle, chacune est parvenue à participer à cette histoire de l’abstraction au milieu des bouleversements mondiaux survenus à travers les conflits, les guerres, les exils… Après ces heures sombres vient le temps de la reconstruction. Cette période est également synonyme de libération pour les femmes, le catalogue d’exposition citant Simone de Beauvoir en 1949 : « Il n’y a pour la femme aucune autre issue que de travailler à sa libération. Cette libération ne saurait être que collective ». S’il restait encore du chemin à parcourir pour atteindre l’objectif de l’égalité, on voit que pour certaines femmes la libération passe par la création et il se dégage des toiles une grande vitalité. Chacune des pièces atteste des références culturelles de sa créatrice, tout en tissant des liens les unes avec les autres. La curatrice Bice Curiger nous explique : « Si cette exposition témoigne des références culturelles hétérogènes des artistes, elle ne révèle pas moins – à l’ère de la mondialisation galopante – des points de contact intenses, et des influences que chacune s’approprie et assimile à sa façon selon les lois sans cesse changeantes ». Ici, la commissaire d’exposition pointe du doigt un « langage commun de l’art de la modernité comme emprunt et référence ». Ces similitudes formelles sont frappantes et sont à la fois le point fort et le point faible de l’exposition. Point fort car, malgré les origines et les parcours différents de ces femmes durant ces quatre décennies, il se dégage incontestablement des mouvements, des couleurs et un élan commun. Point faible car au fur et à mesure que nous découvrons les toiles, les surprises sont rares et ce « langage commun » peut paraître répétitif. Mais de nombreuses pièces de l’exposition sont fascinantes, comme Astres bleus (1969) de Marie Raymond, certaines toiles de Joan Mitchell ou encore l’extraordinaire Tyrannosaurus Rex (1963) de Niki de Saint Phalle.
Une nouvelle fois, la Fondation Van Gogh a souhaité faire le lien avec l’œuvre de Van Gogh à travers cinq tableaux du maître néerlandais. Si lastructure justifie cette relation en affirmant que les artistes abstraites et Van Gogh se réunissent autour de « la question de l’expression et du geste », il est tout de même hasardeux de vouloir toujours construire des ponts entre deux rives si éloignées… Cela étant dit, l’exposition demeure passionnante autant du point de vue historique que sur le plan formel.
