La « Mort heureuse » de Xie Lei chez Semiose

Découverte in extremis de l'exposition la « Mort heureuse » de Xie Lei à la Galerie Semiose programmée jusqu'au 15 mars. L'artiste nous propose une version de la mort comme expérience transcendantale et éblouissante.

Thibault Loucheux-Legendre
Thibault Loucheux-Legendre  - Rédacteur en chef / Critique d'art
4 mn de lecture

Certains auteurs s’approchent d’une certaine transcendance et deviennent une source inépuisable d’inspiration pour les créateurs qui leur succèdent. Pour ces deux dernières expositions chez Semiose, Chant d’Amour (2022) et Mort heureuse(2025), Xie Lei a choisi de convoquer Jean Genet et Albert Camus. Comme nous l’explique Victorine Grataloup dans son texte de présentation de l’exposition « ces discrets hommages s’émancipent des figures tutélaires et fonctionnent d’une manière générale plutôt comme un point de départ pour une série de peintures. Dans ces titres d’exposition, la suppression des articles est à prendre au sérieux : Xie Lei ne souhaite-t-il pas ainsi nous mettre sur la piste de chant(s), de mort(s) qui resteraient radicalement indéfinis ? »

Si la connaissance de l’expérience mortelle a souvent été fantasmée et représentée par les artistes, elle n’en reste pas moins un mystère que seule la fin révèlera… Mais le trépas est-il le terme de l’existence ? Qu’est-ce qu’il y a après la vie ? Grandes questions sans réponse, qui sont encore aujourd’hui un puits sans fin de méditation pour les plasticiens contemporains. Ces interrogations métaphysiques sont au cœur du travail de Xie Lei, lui qui fait sien des questionnements autour de l’esprit, de la nature, de la matière… L’artiste a longtemps utilisé le mot « onirique » pour définir son univers, pointant ainsi du doigt l’importance de l’« entre-deux » et de la nuance. En regardant ses tableaux, on voit que cette référence au rêve est à la fois poétique ou psychanalytique.

La mort est omniprésente dans cette exposition à la Galerie Semiose, du moins autant que la volonté du peintre de nous représenter sa grande vitalité. Cette « Mort heureuse » est finalement l’expression des perspectives de « l’après-vie ». Nous sommes loin des disparus prisonniers d’Hadès, ou des trépassés brûlants en enfer. Dans les toiles de Xie Lei, la lumière vient de ces corps incandescents, des silhouettes humanoïdes que l’on peut imaginer comme une personnification de l’âme. Ce sont ces formes corporelles phosphorescentes qui diffusent la lumière autour d’elles, permettant aux dégradés de couleurs de s’épanouir dans la toile. Certains tableaux sont bleus, d’autres jaunes ou vert… Les teintes choisies et la puissante lumière qui émane des figures invitent le spectateur à une épreuve spirituelle. Xie Lei nous propose ici une vision de la mort comme expérience transcendantale et éblouissante.

Né en Chine en 1983, Xie Lei est diplômé de la CAFA de Pékin et de l’ENSBA de Paris. Il vit et travaille dans la capitale française depuis 2006. Ses pièces ont été exposées dans d’importantes institutions françaises (Fondation Louis Vuitton, MO.CO., CAPC, Villa Noailles, Collection Lambert…) et étrangères. En 2025, il fait partie des finalistes du Prix Marcel Duchamp aux côtés de Bianca Bondi, Eva Nielsen et Lionel Sabatté. L’exposition des nommés de ce prestigieux prix aura lieu au Musée d’art moderne à partir du 26 septembre 2025. L’annonce du lauréat se déroulera le 23 octobre, pendant la semaine de l’art à Paris.

Mort heureuse
Xie Lei
Semiose (Paris)
Jusqu’au 15 mars 2025

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Par Thibault Loucheux-Legendre Rédacteur en chef / Critique d'art
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Après avoir étudié l'histoire et le cinéma, Thibault Loucheux-Legendre a travaillé au sein de différentes rédactions avant de lancer Snobinart et de se spécialiser dans la critique d'art contemporain. Il est également l'auteur de plusieurs romans. 06 71 06 16 43 / thibault.loucheux@snobinart.fr
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